Consultation Nationale des 6-18 ans : la parole aux enfants sur la pauvreté et l'exclusion sociale
Un outil essentiel à la définition des priorités de l’UNICEF France
Entre octobre 2023 et mars 2024, des milliers d’enfants et d’adolescents ont été consultés sur leur quotidien. Près de 20 000 réponses d’enfants venant de plus de 1 800 villes ont ainsi pu être collectées et analysées, permettant de relever, une fois de plus, le défi de la significativité des résultats.
Identifier les manquements dans l’application des droits de l’enfant, préserver leur intérêt supérieur et leur permettre de s’exprimer sur leurs besoins essentiels sont les objectifs majeurs de la Consultation nationale des 6-18 ans.
Alors que la plupart des données existant sur les enfants et leurs droits sont obtenues par l’intermédiaire des adultes, la Consultation nationale des 6-18 ans revêt un caractère unique : celui de s’adresser directement et de manière approfondie aux enfants et aux jeunes.
Les thématiques au cœur de cette édition, la pauvreté et l’exclusion sociale, ont permis de concentrer les efforts de l’UNICEF France vers les enfants éloignés des dispositifs de participation et faisant face à des difficultés importantes et multiples. Les enfants vivant dans les territoires d’Outre-mer, résidant en quartier de la politique de la ville, hébergés hors d’un domicile ou vivant en institution, faiblement représentés dans les éditions précédentes ont fait, cette année, l’objet d’une attention accrue.
151 Villes amies des enfants engagées dans cette enquête incontournable pour mesurer l’application des droits de l’enfant au niveau local
Parmi les 279 structures partenaires de l’UNICEF France, issues du secteur associatif et éducatif, la mobilisation exceptionnelle de 151 Villes amies des enfants a permis à plus de 20 000 enfants et jeunes de s’exprimer sur l’application de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant sous l’angle de la pauvreté et l’exclusion sociale.
En complément du renseignement des traditionnels questionnaires, le projet a aussi permis d’offrir des temps de dialogue et d’ouvrir le débat avec les enfants et adolescents. Des groupes de discussions ont été organisés avec des enfants résidant dans des Villes Amies des Enfants, dans les Hauts-de-France et à La Réunion, ainsi que dans des centres d’hébergement d’urgence d’Île-de-France, pour approfondir, nuancer et illustrer avec des données qualitatives les résultats quantitatifs issus des questionnaires. La dimension qualitative de la démarche a été renforcée par une enquête menée dans un quartier de la politique de la ville d’une ville du nord de l’Île-de-France.
Des recommandations pour répondre à l’enjeu crucial du respect des enfants et de leurs droits
Face aux constats alarmants dressés par l’enquête, l’UNICEF France a dressé de nombreuses recommandations à destination des pouvoirs publics nationaux et mais également à destination des pouvoirs publics locaux et notamment des municipalités et EPCI. Les villes sont des acteurs de choix au vu de leur proximité avec leur population et plus particulièrement avec les enfants qui, pour une majorité, fréquentent leurs structures d’accueil du jeune enfant, écoles, structures péri et extrascolaires, bibliothèque municipales, gymnases etc.
Les villes ont notamment le pouvoir de :
- Réaliser un état des lieux permettant de mesurer les différentes dimensions de la pauvreté des enfants et s’assurer de leur prise en compte dans l’élaboration, le suivi et l’évaluation de leurs politiques publiques locales. L’analyse des besoins sociaux semble être un outil parfaitement adapté au recensement de ces données à l’échelon local. La possibilité de mener chaque année un approfondissement thématique en faveur des enfants et des jeunes permet aux villes de construire un projet social répondant aux nombreux défis soulevés par la pauvreté multidimensionnelle des enfants.
- Renforcer le portage politique transversal de la lutte contre la pauvreté des enfants, en mettant en place des mécanismes de coordination entre les différents services de la ville mais aussi avec les associations partenaires et les institutions.
- Lutter activement contre le non-recours aux prestations sociales et familiales.
- Lever les barrières d’accès aux services essentiels en favorisant le développement de la tarification sociale ou tout autre dispositif permettant de réduire le reste à charge des familles en situation de pauvreté, en simplifiant les démarches, en favorisant l’accompagnement des familles dans celles-ci et en s’assurant de la visibilité et de la lisibilité de l’offre de services existante et des aides disponibles.
- Protéger le droit des enfants à être entendus grâce à un cadre légal et à une gouvernance adaptée, sensibiliser, former et informer les adultes et les enfants sur le droit à la participation.
- Développer les espaces de participation qualitatifs des enfants à la vie politique et faciliter l’accès des enfants en situation d’exclusion aux dispositifs déjà existants.
- Renforcer la sensibilisation des enfants à leurs droits, aux discriminations et à la détection des violences subies ou observées ; s’assurer qu’ils connaissent les services disponibles ainsi que les réflexes à adopter en élaborant des supports d’information diversifiés, adaptés à leur âge, et diffusés dans des lieux stratégiques ou sur les canaux qu’ils privilégient – l’implication des enfants dans la création de ces supports est primordiale pour s’assurer qu’ils répondent à leurs besoins et pour encourager leur appropriation.
Découvrez l’intégralité des recommandations de l’UNICEF à destination des pouvoirs publics
Enfants et adolescents en souffrance : privations, déficit et rejet social
Dans un contexte d’enracinement de la pauvreté, de renforcement des inégalités sociales et de cumul des crises (sanitaire, inflation, etc.), la situation socio-économique des familles, plus exposées au risque de pauvreté et d’exclusion sociale, se dégrade. Cette situation fait peser un risque important d’augmentation de la pauvreté infantile. Il est ainsi nécessaire de structurer une politique volontariste de lutte contre la pauvreté multidimensionnelle des enfants, adaptée aux besoins et contribuant à protéger et mettre en œuvre les droits des enfants, notamment des plus vulnérables.
Il apparaît également important de mieux comprendre les mécanismes par lesquels les enfants et les adolescents de 6 à 18 ans peuvent faire l’expérience de souffrances, dans leur vie quotidienne, qui, en se cumulant, peuvent aboutir dans certains cas au sentiment d’être tout à la fois dévalorisés par rapport aux autres, infériorisés, en situation d’insécurité et, progressivement, rejetés des groupes, des lieux ordinaires de socialisation et donc de la société.
25,4% des enfants et jeunes sont confrontés à des privations dans l’accès aux savoirs
Les 6-18 ans enquêtés ont fait part de leur ressentis sur différents domaines de leur vie en lien avec :
- La connaissance & le respect des droits
- L’école
- La santé & le bien-être
- Le logement & l’environnement de vie
- L’insécurité, violences et discriminations
Les résultats révèlent que de nombreux enfants et jeunes manquent de ressources et n’ont pas les conditions essentielles pour vivre une enfance normale et s’épanouir de manière équilibrée, ce qui les expose à des privations.
D’autres effets viennent s’accumuler à la souffrance des enfants et jeunes, comme le déficit de protection ou encore le rejet social, qui sont des conditions essentielles à l’épanouissement.
44,4 %
48,1 %
11,1 %
Ces constats sont d’autant plus frappant pour les enfants et jeunes vulnérables.
Les enfants et adolescents vivant dans les quartiers de la politique de la ville et ayant participé à la démarche présentent 2 fois plus de risque d’avoir le sentiment que leurs droits ne sont pas respectés que les autres.